Tôkyô est la capitale du Japon, c’est simple à retenir et semble évident mais c’est loin d’être aussi simple. La mégapole japonaise n’est que la dernière en date d’une longue série et, de temps en temps, émergent même des projets de nouvelle capitale, jamais réalisés. Kyôto, Kamakura, Nara etc. Vous trouverez d’autres villes se parant du titre d’ancienne capitale du Japon. Que signifient ces changements ?
La capitale vagabonde : Asuka-kyô

Qui dit capitale dit pouvoir politique. La capitale du Japon était historiquement la ville où résidait l’empereur et où se trouvait son palais (都, Miyako). C’est donc avec l’émergence du royaume du Yamato qu’émergea en même temps la première capitale. Quand le Japon sortit de la protohistoire au VIe siècle, le royaume du Yamato existait déjà depuis probablement le IVe siècle. Nous n’avons pas de traces archéologiques d’un palais protohistorique mais les grandes tombes à tumulus (les kôfun) qui constellent la plaine du Yamato et le littoral de Naniwa (Osaka) montrent que c’est là que résidait un pouvoir capable de mobiliser les hommes et les moyens nécessaires à leur construction. Les chroniques impériales du VIIIe siècle reconstituant le passé mythique de la dynastie impériale situent le palais du premier empereur Jimmu à Kashihara, dans le Sud de la plaine du Yamato, près de ce qui est appelé Asuka-kyô.

C’est là que se trouve le palais (宮, miya) des rois du VIe-VIIe siècles, ou plutôt les palais. La succession des souverains montre qu’à chaque règne le site du palais était abandonné pour être déplacé sur un nouveau site. Cette pratique est expliquée dans les sources japonaises par la crainte de souillure causée par la mort du souverain précédent et la crainte de l’influence de son esprit (jusqu’à l’époque Heian la crainte des esprits vengeurs resta une préoccupation majeure dans les croyances). Il ne s’agissait pas d’un déménagement lointain, les emplacements des différents palais n’étaient généralement séparés que de quelques kilomètres et il n’était pas rare de voir la cour revenir sur un site déjà utilisé dans un règne précédent parce que celui-ci disposait d’avantages pratiques, que les bâtiments pouvaient être réparés ou que son orientation était idéale (dans l’idée de la géomancie chinoise, le fengshui).

Les archéologues ne sont pas certains si les bâtiments étaient démontés et déplacés, simplement laissés à l’abandon ou s’ils conservaient une activité et étaient maintenus. Le palais, était un vaste espace divisé en plusieurs sections ceintes de murs. La résidence de l’empereur, le Dairi, même n’était qu’une petite partie de l’ensemble insérée dans un plus vaste ensemble de bâtiments cérémoniels et religieux (dont le Daigokuden, à la fois salle du trône et salle de cérémonie). Cet ensemble était lui-même inséré dans un espace plus vaste de bâtiments gouvernementaux : la salle du conseil le Daijôkan puis les différents départements, bureaux, archives, entrepôts, terrains de manoeuvres etc. Il s’agit cependant d’une description valable pour Nara et Kyôto. A l’époque Asuka le palais devait être moins étendu et moins spécialisé, construit dans un style autochtone encore sans influence chinoise (plus proche peut-être de ce qui se trouve au sanctuaire d’Ise) avec des bâtiments construits sur des plate-formes de terre tassée et aux toits de chaume. Les murs étaient peints en blanc avec des colonnes et charpentes rouges. Les structures de pierre y étaient encore et ne sont vraiment documentées qu’à partir de la fin du VIe siècle. Un tel ensemble pouvait être construit rapidement, d’autant plus que nous savons que dans certains cas le bois était réutilisé pour être remonter sur le nouveau site.

Les sites de palais de l’époque se situent dans une zone circonscrite qui correspond aujourd’hui à la localité d’Asuka et furent rassemblés à l’époque moderne sous le nom d’Asuka-kyô (飛鳥京, 京/kyô étant l’idéogramme de la capitale). Asuka peut se vanter d’être la première capitale du Japon même s’il n’en reste rien aujourd’hui et qu’Asuka même n’était pas une ville à l’époque. Le déménagement du palais ne signifiait pas la construction à chaque fois d’une nouvelle ville capitale. Autour du palais devait exister une localité où résidait la noblesse et toutes les personnes dépendantes du palais. Cette « capitale » ne faisait pas alors l’objet d’un plan urbain et était probablement éparpillée en plusieurs localités groupées autour de palais princiers satellites. C’est ainsi que la localité appelée aujourd’hui Asuka prend en fait son nom du temple Asuka-dera, le plus ancien temple bouddhiste du Japon qui fut construit au VIe siècle à l’emplacement du manoir du clan Soga, une puissante famille de la noblesse. Le Japon du VIe-VIIe siècle ne connaissait pas encore de véritable ville.

Si Asuka concentre la majorité des sites de palais mentionnés, la cour pouvait se déplacer plus loin au Nord vers le centre de la plaine du Yamato comme Sakurai et Kôryô ou encore plus loin vers le littoral près de l’actuelle Osaka à Naniwa. Il n’y a pas de raison de douter du Nihon Shôki lorsqu’il donne des noms de palais pour les époques correspondant au IVe-Ve siècles mais la plupart n’ont pas d’emplacements identifiés. L’empereur Kinmei, qui débute la période historique, était installé au palais Shikishima no Kanasashi à Asuka, chacun de ses successeurs eu son propre palais. L’assassinat de l’empereur Sushun en 592 semble avoir justifié un déménagement plus important de Sakurai vers Asuka au palais Oharida pour l’impératrice Suiko en 593. Celui-ci a été identifié et en partie fouillé mais ses reconstitutions sont surtout le fruit des descriptions postérieures. C’est le mieux connu de la période car c’est probablement là que le régent Shôtoku rédigea la constitution en 17 articles et mit en place le premier système de rang de cour. Le prince lui-même résidait à l’Ikaruga no Miya (le palais associé au temple Hôryû-ji fondé par le prince), orienté vers la capitale vers à une saine distance des puissants Soga d’Asuka. Plus qu’une ville capitale, c’était le Yamato entier qui était un vaste centre de pouvoir dispersé. La sélection d’un site plutôt qu’un autre semble avoir répondu à des luttes d’influence au sein de la cour, ainsi s’éloigner d’Asuka semble avoir été un signe d’indépendance face au clan Soga qui dirigea réellement le Yamato entre la fin du VIe et presque la moitié du VIIe siècle.

Après Suiko et Jômei, l’impératrice Kyôgoku résida au palais Itabuki quand, en 645, son fils le prince Naka no Oê assassina Soga no Iruka en pleine cérémonie et élimina le pouvoir de ces nobles ambitieux. La violence de l’acte mena à abandonner le palais pour le nouvel empereur Kôtoku (Kyôgoku ayant abdiqué car elle se considérait souillée par l’acte de son fils perpétré en sa présence). Le nouveau palais fut transporté à Naniwa (palais Nagara-Toyosaki) pour 9 ans avant que l’homme fort du règne, le prince Naka No Oê lui-même décida de ramener la cour au palais Itabuki inaugurant pour la première la dissociation entre la résidence de l’empereur (à Naniwa) et la capitale (à Asuka). Lorsque Kyôgoku revint sur le trône sous le nom de Saimei, la cour déménagea de manière exceptionnelle jusque dans le nord du Kyûshû, près de l’actuelle Fukuoka, au palais Asakura. Il s’agissait alors pour Saimei et Naka no Oê de préparer l’invasion de la Corée afin de venir en aide à leur allié du Baekje, une aventure qui se termina en désastre. La mort de Saimei en 661 ramena le palais dans le Yamato et mit finalement sur le trône Naka no Oê sous le nom d’empereur Tenji. Ce dernier avait de grands projets.

Fixer la capitale, mais où?
L’empereur Tenji fut sans doute l’un des souverains les plus actifs de l’histoire japonaise, l’un des plus décisifs aussi puisqu’il représente une étape décisive dans la transition du royaume du Yamato vers l’empire japonais. Lorsque le bouddhisme arriva au Japon sous le règne de Kinmei débuta une période de transformation culturelle profonde. La nouvelle religion apportait avec elle, via la Corée, l’écriture chinoise, sa littérature, sa poésie mais aussi ses arts et son architecture et enfin son modèle de société fondé sur le confucianisme et son type de gouvernement. La sinisation du Japon au VIe-VIIe siècle fut comparable à son occidentalisation au XIXe-XXe siècle.

Les rois du Yamato soutinrent cette évolution en s’appuyant sur certains clans bouddhistes comme les Soga. Il s’agissait jusque là d’un royaume où le souverain devait compter avec une puissante noblesse, sans doute descendante des pouvoirs locaux conquis ou ralliés qui se donnait aussi pour ancêtres des kamis. Le modèle chinois apportait l’idée d’une monarchie centralisée autour d’un souverain supérieur à sa noblesse et gouvernant par l’intermédiaire d’une cour organisée et hiérarchisée. L’action du prince Shôtoku, bouddhiste dans l’âme, montre ainsi sa volonté de passer à ce modèle, sa constitution fait de l’empereur le garant du bien être du Japon par son respect du culte bouddhiste et il instaura la première définition d’une noblesse de cour organisée en rangs.
Dans ce modèle, une capitale temporaire devenait un handicap, le vagabondage de la cour ne permettait pas de développer un gouvernement à la chinoise dont les différentes branches avaient besoin de bâtiments spécialisés, de personnel, d’archives, d’entrepôts etc. Le déménagement régulier était aussi par trop lié à l’influence des différentes factions sur la cour comme à l’époque des Soga. Enfin il y avait aussi simplement l’imitation, la Chine des Tang et les royaumes coréens avaient chacun une ville-capitale centrée sur un palais, pour être considéré comme civilisé le Japon devait faire de même.

Après la disparition du prince Shôtoku, le futur empereur Tenji s’attacha à mener cette évolution vers un pouvoir impérial fort. Que l’on attribue la décision à l’empereur Kôtoku ou à Naka no Oê, le déplacement de la capitale vers Naniwa (au palais Nagara) répondait à cette volonté. Le nouvel emplacement fut désigné non seulement comme nouveau palais mais aussi comme capitale en remplacement d’Asuka. Naniwa avait l’avantage d’être ouverte sur la mer et d’être ainsi permettre des contacts commerciaux et diplomatiques plus intenses avec le Baekje en Corée. De manière inattendue le prince ordonna cependant le retour à Asuka, ce que l’empereur refusa. Le prince accomplit néanmoins le déménagement, emportant avec lui l’essentiel de la noblesse de cour, l’ancienne impératrice Kogyôku et même l’épouse de l’empereur (et soeur du prince), laissant l’empereur pratiquement abandonné dans un palais vidé où il décéda de maladie l’année suivante.

Comment expliquer ce geste ? Les principales hypothèses supposent que le mécontentement d’une partie de la noblesse poussa au retour à Asuka pour préserver les alliances politiques ou empêcher toute tentative de rébellion. Faute de mieux on a aussi supposé une rupture politique entre Kôtoku et le prince Naka no Oê mais la cause n’en est pas évidente. Toujours est-il qu’en 655, Naka no Oê se retrouvait avec une ville nouvelle et un palais flambants neufs à Naniwa ainsi qu’une deuxième capitale à Asuka. Il régularisa la situation au nom de sa mère en déclarant que le Japon aurait deux capitales et deux palais à Naniwa et Asuka. Naniwa en tant que capitale secondaire (Baitô) fut justifiée, comme souvent, par la comparaison avec la Chine des Tang où existaient deux capitales historiques, Chang’an et Luoyang. L’activité se poursuivit ainsi à Naniwa jusqu’à la fondation de Kyôto au VIIIe siècle même si les empereurs n’y résidèrent que de manière exceptionnelle et brève, c’est de là que partirent les premières ambassades vers les Tang à l’époque Nara.

Si on met de côté le transfert éphémère du palais dans le Kyûshû il faut attendre 661, quand le prince devint l’empereur Tenji, pour voir ses projets mis en oeuvre. Il ordonna rapidement la construction d’une nouvelle capitale loin d’Asuka et en dehors même du Yamato. La nouvelle capitale fut installée à Ôtsu (aujourd’hui une banlieue de Kyôto) sur le bord du lac Biwa et fut appelée Ômi-kyô. Le nouvel emplacement était à un carrefour stratégique vers les provinces, loin d’Asuka et bordant un vaste lac d’eau douce à la fois voie de communication et source d’approvisionnement. Il répondait aussi à un nouvel impératif, la défaite japonaise en Corée face à l’alliance des Tang et du Silla faisait craindre une possible vengeance coréenne et le risque d’une invasion, Naniwa était trop exposée mais Ômi était plus en sécurité à l’intérieur des terres. Le choix fut critiqué et les batiments construits furent même victimes d’incendies volontaires, véritables actes de sabotage de la part d’opposants issus de la noblesse.

Le site du palais a été identifié mais le projet reste mal connu, d’une part il dura peu (une dizaine d’années) mais surtout rien n’indique vraiment que Tenji tenta de créer une véritable capitale et pas seulement un palais impérial. Il ne créa pas un district sur lequel une ville aurait pu être construite. Le projet d’une capitale permanente allait de paire alors avec l’idée de constuire une ville. Cette ville devait suivre le modèle chinois du jôbôsei, une ville à plan orthogonal. Une vaste grille centrée sur le palais. Une partie des historiens japonais pense qu’il s’agissait déjà du projet de Tenji mais les preuves manquent. Ômi-kyô eu une existance brève, puisqu’à la mort de Tenji, son fils et successeur Kôbun dut faire face à la révolte de son oncle, le prince Ôama. Une brève guerre civile éclata en 672 au cours de laquelle le prince rassembla les mécontents d’Asuka et remonta jusqu’à Ômi. Kôbun fut vaincu, son palais brûla et ne fut jamais réoccupé. Ôama prit le nom de règne de Tenmu et ramena le palais à Asuka. Malgré ses échecs, Tenji semble avait fait passer l’idée d’une capitale fixe, le problème était de se fixer sur un lieu.

Tenmu était le véritable successeur de la politique de Tenji. Il poursuivait aussi l’objectif de créer une monarchie de style chinois. Il est d’ailleurs le premier souverain à se parer du titre de tennô, empereur, imité du souverain céleste chinois (et rétroactivement attribué à ses ancêtres). Pour satisfaire ses partisans, il ramena le palais à Asuka dans le nouveau palais Kiyomihara mais dès ses premières années il entama parallèlement la construction d’une capitale permanente sur le modèle chinois. C’est à Asuka et nulle part ailleurs que devait être construite la première capitale permanente du Japon : ce fut Fujiwara-kyô.
Créer le centre du monde : Fujiwara-kyô et Heijô-kyô
Fujiwara-kyô n’était pas construite sur un site vierge, il s’agissait rien de moins que de Kashihara, le site du palais du premier empereur légendaire. A l’époque le nouveau palais s’appelait Aramashi-kyô et cette fois-ci nous sommes face à un véritable projet urbain. Construire une véritable ville avec ses quartiers, ses axes et son palais était une tâche autrement plus longue que la construction d’un palais aux structures légères, les travaux débutèrent sous l’empereur Tenmu mais se prolongèrent sous le règne de son successeur, sa soeur-épouse Jitô, eux-mêmes n’y résidèrent pas, la nouvelle capitale était destinée au règne de leur fils Monmu, lorsqu’il atteindrait l’âge adulte.

Les fouilles ont démontré que le palais impérial, construit de manière monumentale, était entouré d’une véritable ville au périmètre défini, aux rues se coupant à angles droits. La porte principale s’ouvrait au Sud (porte Rashô) et reliait le palais par l’avenue Suzaku. L’axe Sud-Nord porte-palais et la symétrie des bâtiments est une constante des palais chinois qui se retrouve encore mille ans plus tard lors de la construction de Beijing et existait déjà sous la dynastie Xia. L’ouverture vers le Sud ne se justifiait d’ailleurs pas autrement puisque le Sud du Yamato menait vers un cul de sac composé de montagnes tandis que les communications et les activités pointaient plutôt vers le Nord-Ouest et le littoral et les provinces.

Les fouilles révélèrent aussi quelques surprises. Selon le modèle chinois le palais devait occuper la partie Nord de la ville et son axe principal traverser entièrement celle-ci. A Fujiwara-kyô, le palais fut installé au centre de la ville, au croisement de deux axes Ouest-Est et Sud-Nord, donnant ainsi une sorte de symétrie à l’ensemble qui était peut-être l’effet recherché. Ce plan inhabituel ferait référence à celui de la cité idéale décrite dans les Rites des Zhou, un classique chinois de la dynastie Han (le même classique contient la description du plan de cité en grille appelé jôbôsei en japonais). Tenmu a-t-il voulu consciemment imiter les références les plus classiques disponibles ou était-ce là le seul document du genre disponible au Japon à l’époque? Le projet n’était en tout cas pas timide, la ville dans son ensemble couvrait 25 km², plus grande que ne seraient ensuite Nara puis Kyôto. Le projet recouvrait l’essentiel d’Asuka-kyô et fit sans doute disparaître un bon nombre des sites palatiaux de l’époque précédente, englobant même plusieurs tombes kôfun dont celle du premier empereur Jinmu. Les bâtiments du palais étaient construits sur des plate-formes de pierre et les toitures étaient probablement couvertes du tuiles selon le style chinois, une innovation pour l’époque. Les fouilles nous ont aussi livré un important trésor d’inscriptions sur tablettes de bois dont un grand nombre étaient des écrits administratifs mentionnant des fonctions et des bâtiments au sein du palais, montrant l’avancée de l’organisation d’un Etat fonctionnel.

L’impératrice Jitô déménagea officiellement en 694 à Fujiwara-kyô, les travaux étaient semblent-il encore en cours. Ils étaient restés en cours pendant les 16 années d’existence de la ville, les fouilles archéologiques semblent suggérer que toutes les parties de Fujiwara-kyô n’étaient pas terminées lorsque l’impératrice Genmei déménagea vers Nara en 710. Une partie des constructions de Fujiwara-kyô furent déménagées vers Nara mais le Nihon Shôki indique que le palais même fut volontairement incendié en 711. Pourquoi détruire une ville aussi récente et coûteuse? Les habitudes ont la vie dure et il semble que le successeur de Jitô, l’empereur Monmu, ait conservé les croyances anciennes du transfert de la capitale à la mort d’un souverain. Il ne quitta pas lui-même sa toute nouvelle capitale mais ordonna la sélection d’un nouveau site et le début des travaux en prévision du règne de son jeune fils, le futur empereur Shômu. Monmu décéda jeune et le prince n’ayant que sept ans, on mit sur le trône la mère de celui-ci, l’impératrice Genmei qui poursuivit les volontés du défunt. C’est elle qui mena le grand déménagement vers Nara, appelée alors Heijô-kyô.

La nouvelle ville ressemble à une version aboutie de Fujiwara-kyô. On y retrouve l’axe Sud-Nord entre la porte Rashô et le palais via l’avenue Suzaku à la différence près que le palais occupe désormais la partie Nord de la ville et que la grande avenue prend des dimensions monumentales, passant de 25 mètres de largeur à Fujiwara-kyô à 75 mètres de largeur : un peu plus large que les Champs-Elysées mais deux fois plus longue. L’avenue séparait les deux parties de la ville, Ukyô (ville de droite) et Sakyô (ville de gauche), d’autres subdivisions permettaient de séparer les différents rangs de noblesse et les différents métiers. La nouvelle capitale restait alors associée à Naniwa dans le système des deux capitales conjointes. Nara se présente toujours comme la première capitale permanente du Japon même si le titre aurait dû revenir à Fujiwara-kyô, mais il ne s’agit pas encore d’une capitale unique.
Nara eu cependant bien plus de succès que Fujiwara-kyô. La raison tient peut-être au ralliement des principaux clans nobles au premier rang desquels les Fujiwara. Fujiwara no Fuhito avait été le personnage dominant du règne de Genmei et Genshô et il était parvenu à imposer sa fille Kômyô comme la première impératrice à ne pas provenir de la famille impériale même (avant cela les mariages endogamiques à l’intérieur du clan impérial étaient la règle) et ses fils monopolisaient les charges de l’Etat. De même que l’empereur, ils déménagèrent jusqu’à Nara jusqu’à y implanter le sanctuaire shintô familial en 764, le Kasuga Taisha. On peut y voir aussi un succès de la construction d’une cour aux fonctions bien définies dans le cadre de laquelle la noblesse se fondit, acceptant son rôle.

Nara a failli connaître le même sort que Fujiwara-kyô. Shômu était finalement monté sur le trône après l’abdication de l’impératrice Genshô en 724 mais en 735, le Japon fut touché par une importante épidémie qui fit des ravages jusqu’au sein de la noblesse (tuant par exemple les quatre fils de Fujiwara no Fuhito, décapitant le clan), ajoutons à cela plusieurs révoltes ou rumeurs de révoltes (Fujiwara no Hirotsugu en 740) firent que l’empereur ne se sentait pas en sécurité à Heijô-kyô et entreprit une tournée inédite des provinces de l’Est. A son retour, il déclara son intention de fonder un nouveau palais à Kuni-kyô dont les travaux débutèrent mais dès 743 un nouvel ordre impérial décidait de transférer la capitale à Naniwa sans abandonner Kuni-kyô (pour renouveler le système à deux capitales?) et un troisième ordre arrivant en 745 ordonna la construction d’un nouveau palais à Shigaraki-kyô sans que l’on sache si les travaux commençèrent.

Shômu avait la bougeote mais il dut se rendre à l’évidence, en trente ans Nara était devenue incontournable. Il ne s’agissait pas seulement du poids de l’immense palais, de son administration et de la noblesse, Nara était aussi devenue un centre religieux majeur. Plusieurs ambassades japonaises étaient parties de Nara à l’ère Tenpyô vers la Chine pour en ramener des texte sacrés mais aussi des maîtres capables de réhausser le clergé japonais aux standards du continent (le moine Jianzhen/Ganji fit le voyage et fonda le Tôshôdai-ji). Plusieurs temples importantes marquaient déjà la capitale mais en 743, en réaction aux difficultés du temps, Shômu avait lancé son grand projet religieux : la construction du Grand Bouddha au sein du Tôdai-ji.

Il ne s’agissait pas seulement d’un monument vain, le Tôdai-ji devait concentrer les ordinations de prêtres dans la capitale et devenir en quelque sorte le temple chaperonnant un réseau de temples provinciaux appelés Kokubun-ji, un par province. Ces temples, construits près des bâtiments gouvernementaux des gouverneurs kokushi doublaient pratiquement l’administration provinciale, ils devaient assurer la protection du pays dans toutes ses provinces mais facilitaient aussi la transmission de consignes religieuses et d’une morale dominée par l’empereur qui se proclama serviteur du Bouddha lors d’une grande cérémonie en 749. Il s’agissait d’une étape supplémentaire dans le processus de centralisation de l’Etat étendant désormais ses tentacules jusque dans les provinces. De manière générale Nara était bien dotée en temples, Daian-ji, Yakushi-ji, Gango-ji et Kôfuku-ji étaient bâtis dans la ville même tandis que Tôdai-ji occupait l’Est et un temple Saidai-ji occupait l’Ouest (construit sur l’ordre de l’impératrice Shôtoku, il devait faire le pendant du Tôdai-ji mais n’atteignit jamais son importance). Associés au temple Hôryû-ji d’Ikaruga ils furent connus comme les 7 temples de Nara, accueillants les premières grandes écoles qui structurèrent le bouddhisme jusqu’au IXe siècle.

La construction du Grand Bouddha, interrompue de 743 à 745, fut reprise dès le retour de l’empereur à Nara et se poursuivit sans interruption jusqu’en 752 sous le règne de la fille de Shômu, l’impératrice Kôken. Shômu, de son côté, s’était retiré pour devenir le premier empereur à entrer dans les ordres bouddhistes. La construction du Tôdai-ji eu un effet important sur le plan même de Nara. Le plan originel le long de l’axe Sud-Nord se doubla d’un axe secondaire Est-Ouest reliant le palais impérial au Tôdai-ji et le long duquel les fondations de temples se multiplièrent, les Fujiwara fondant par exemple leur propre temple familial, le Kôfuku-ji (qui était uni avec le Kasuga Taisha jusqu’au XIXe siècle quand sanctuaires shintô et temples bouddhistes furent officiellement séparés sur ordre de l’empereur Meiji). Cette dernière partie se rajouta à Ukyô et Sakyô sous le nom de Gekyô (ville extérieure).

Le palais lui-même avait en partie été démoli lors du déménagement raté de 740 et le retour obligea la cour à s’installer dans la partie Est du palais dont les bâtiments réaménagés et plus petits (la grande salle de cérémonie, le Daigokuden, reconstruit à Nara se situe sur l’emplacement du premier bâtiment d’avant 740). La population compta peut-être jusqu’à 100 000 habitants (ou le double selon les estimations) dont des commerçants étrangers venus de Chine, de Corée et même de l’Inde mais la ville, pensée pour être une capitale politique, s’avéra ne pas être adaptée à une large population. Les cours d’eau et les puits locaux ne suffisaient pas à l’approvisionnement en eau et la ville manquait d’axes navigables pour son approvisionnement alimentaire et commercial. En l’absence de système de sanitation la ville était réputée sale (expliquant peut-être la virulence de l’épidémie de 735).

Ce ne fut cependant pas la raison de son abandon puisqu’en dehors de l’épisode de 740-745, Nara resta la capitale du Japon (avec Naniwa) pendant 74 ans. Capitale construite dans un but politique, son échec final avait une raison toute aussi politique. Le règne de l’impératrice Kôken avait été mouvementé, la souveraine ayant été forcée d’abdiquer une première fois pour remonter ensuite sur le trône sous le nom de Shôtoku. Cette instabilité était à la fois due au poids grandissant du clan Fujiwara au sein de la cour et des luttes de factions résultantes et aussi au poids des temples bouddhistes de la ville qui, avec Kôken/Shôtoku, avaient atteints l’apogée de leur influence sur la cour. Après le décès de l’impératrice décriée (et humiliée de manière posthume) en 770, le nouvel empereur Kônin était un homme d’âge déjà mur. C’était un fonctionnaire de carrière dont le lien avec sa prédecesseure était assez éloigné. Kônin était en fait le descendant de la branche de la famille impériale issue de Tenji, tandis que les descendants de Tenmu furent écartés aprés Shôtoku. Avec Kônin venait aussi son fils et nouvel héritier déjà adulte, Kanmu. Ce fut ce dernier qui franchit le dernier pas vers une capitale unique et permenante.

Heian-kyô, une capitale pour 1000 ans
Lorsque le jeune Kanmu décida de quitter Nara en 784, il ne s’agissait pas d’une fuite improvisée comme l’avait fait Shômu quarante ans auparavant. Les raisons données dans les chroniques sont simples : l’empereur voulait une capitale ayant de meilleures ressources en eau et un meilleur accès à la mer. Il voulait plus, cette fois le déménagement devait se faire sur un site entièrement vierge de toute influence, celle de la noblesse (et des Fujiwara en premier) et celle des temples. Il porta son choix sur Nagaoka-kyô dans la province de Yamashirô, 40 km au Nord-Ouest de Nara. Nagaoka était situé sur une plaine au confluent de plusieurs rivières, l’Uji et la Katsura se rejoignaient pour former la Yôdô qui allait se jeter à Naniwa. Les axes fluviaux étaient navigables et permettaient facilement de remonter jusqu’à la capitale. Mieux encore, l’endroit n’appartenait pas à une famille importante mais plutôt à des communautés de descendants d’étrangers dont des Coréens (la mère de Kanmu était elle-même une descendante de la famille royale du Baekje). A la différence de ce qui existait depuis un siècle et l’époque de Tenji, Kanmu affirma l’unicité de la capitale. En s’installant à Nagaoka-kyô il déchut Nara et Naniwa de leurs statuts de capitales secondaires. Nagaoka-kyô devint ainsi la première capitale permanente et unique du Japon. Elle ne dura pas.

Nagaoka-kyô était sur une plaine fluviale, cela signifiait aussi que le site était facilement inondable et cela se produisit à plusieurs reprises durant les travaux. Mais ce n’est pas une histoire d’eau qui coula le projet, ce furent les fantômes. Le transfert de capitale avait engendré une forte opposition chez les temples de Nara et la noblesse de cour, comme pour beaucoup de transferts précédents. Ômi-kyô avait été incendiée par des opposants plus d’un siècle auparavant. En 785, Fujiwara no Tanetsugu, un des officiers responsables du chantier fut découvert assassiné. L’enquête pointa du doigt un complot ourdi par le prince Sawara, cadet et héritier de Kanmu. Le prince fut exilé et mourut peu de temps après, de là des phénomènes variés furent interprétés comme des manifestations de l’âme tourmentée du prince. La croyance dans le pouvoir des fantômes n’était pas rares et si des opposants s’amusaient à interpréter des signes à la moindre occasion cela pouvait devenir un sérieux moyen d’opposition.

Pour y répondre Kanmu ordonna dès 794 le transfert de la capitale juste un peu plus loin dans l’Est de la plaine de Yamashirô, à quelques kilomètres à peine du premier site : Heian-kyô. L’actuelle Kyôto conservait les avantages de Nagaoka-kyô en étant un peu moins bien reliée aux voies navigables mais son orientation géomantique était parfaite pour les experts de l’époque et il remplissait les objectifs de l’empereur. Par jugement postérieur, Nagaoka-kyô devint la « capitale fantôme », un projet avorté que plusieurs historiens considèrent même comme une étape temporaire pour le vrai déménagement vers Heian-kyô. Les fouilles organisées après 1954 ont cependant démontré qu’en dix ans à peine, l’empereur Kanmu était parvenu à faire construire une ville complète et fonctionnelle aux dimensions comparables à celles de Nara et Kyôto. Cette construction en temps record montre à elle seule les effets de la centralisation voulue par les empereurs. Kanmu disposait d’une cour aux agents compétents, de moyens plus importants et était capable de transmettre et faire respecter ses édits tel un véritable souverain régnant. Heian-kyô fut complétée tout aussi vite selon le même plan quadrillé désormais maîtrisé. Kyôto n’accueillit pas de temples bouddhistes au sein de son périmètre, elle devait rester la ville de l’empereur mais Kanmu s’ingénia à favoriser la naissance de nouveaux courants bouddhistes qui seraient capables de rivaliser avec les écoles de Nara. Le cadre était posé, Kyôto resterait la capitale du Japon pour mille ans jusqu’en 1868.

Nara de son côté ne sombra pas, elle resta la ville des écoles bouddhistes qui conservèrent longtemps un poids culturel fort, elles existent encore. Nara faillit même redevenir capitale lorsque en 810 (16 ans après la fondation de Kyôto) l’ancien empereur Heizei (fils de Kanmu), défiant son frère l’empereur régnant Saga, ordonna le transfert de la cour avec lui à Nara (incident de Kusuko). Saga y mit rapidement de l’ordre en punissant les membres de l’entourage d’Heizei et en forçant son frère à entrer dans les ordres. Nara resta par la suite l’ancienne capitale endormie et passa progressivement sous l’autorité de l’abbé du Kôfuku-ji qui faisait fonction de gouverneur de la ville. Le statut de Kyôto en tant que capitale ne fut plus remis en question hormis pour la brève période au XIIe siècle où le tyran Taira no Kiyomori projeta de déménager la capitale à Fukuhara-kyô (Kobe) mais même si la ville fut construite, elle fut pratiquement abandonnée immédiatement. Pour les siècles suivants, Heian-kyô devint Miyako, la capitale impériale, ou simplement Kyô. Le nom de Kyôto ne s’imposa que tardivement à l’époque contemporaine.
Capitale de l’empereur, capitale des guerriers, capitale des parlementaires?
A la fin du XIIe siècle, l’époque Heian finissante vit l’émergence du pouvoir des guerriers dans les provinces. La guerre du Gempei (1181-1185) vit la victoire du seigneur de Kamakura, Minamoto no Yoritomo, qui se fit attribuer le titre de shôgun et le transforma en véritable maître des guerriers, gouvernant les provinces au nom de l’empereur. Le shôgun puis son régent résidaient et gouvernaient depuis Kamakura, le fief personnel des Minamoto, la petite localité du Kantô, malgré ce que l’on peut lire, n’a jamais été une capitale du Japon mais fut un pôle de pouvoir en tant que résidence du shôgun. Kamakura exerça des fonctions de commandement mais Kyôto restait aux yeux de tous la véritable capitale, résidence de l’empereur et non du simple chef des guerriers. Kamakura représentait d’ailleurs bien peu de chose, quelques manoirs seigneuriaux entourés de masures coincées par des collines servant de murailles naturelles. Le coeur de ville était la demeure shôgunale et le sanctuaire Hachimangu mais la ville n’avait ni l’envergure ni le lustre de Kyôto.

Kyôto resta la principale et la seule véritable ville du Japon durant l’époque Kamakura. C’est pour cette raison qu’à la fin de cette période, au XIVe siècle, les nouveaux shôguns de la dynastie Ashikaga décidèrent de s’y installer (dans le quartier Muromachi), réunissant l’autorité « civile » de l’empereur à l’autorité militaire du shôgun. Cet état était contesté par une autre branche de la famille impériale qui s’était rendue indépendante des Ashikaga. Go-Daigo et ses successeurs régnèrent sur leurs fidèles depuis les montagnes de Yoshino, au Sud d’Asuka, un lieu difficile d’accès qui leur servit de refuge durant les guerres civiles même s’ils passèrent le plus clair de leur règne près de Naniwa. Après leur soumission, Kyôto redevint la seule capitale mais ne fut bientôt plus la seule ville.

Les guerres civiles du Sengoku Jidai menèrent à la fracture du Japon en principautés féodales. A mesure que ces principautés se renforçaient, s’étendaient et s’organisaient, les demeures féodales devinrent progressivement le noyau autour duquel se développèrent les villes sous le château (jôkamachi), la base de la plupart des villes japonaises actuelles. Chacune de ces villes nouvelles étaient une petite capitale régionale. Certaines, dirigées par des seigneurs lettrés ou souhaitant exprimer leur richesse en imitant la culture de la cour shogunale et impériale, devinrent des « petites Kyôto ». La ville de Yamaguchi, fief du clan Oûchi au début du XVe siècle se vit même parée du surnom de « capitale de l’Ouest » (西京, Saikyô). Oûchi Yoshitaka tenta d’enlever l’empereur en 1551 pour le transférer à Yamaguchi sous sa « protection ». Les jôkamachi du Sengoku Jidai ne tiennent cependant pas la comparaison avec la construction des capitales des ères Asuka et Nara. Elles ne disposaient généralement pas de plan urbain préparé hormis la zone du château même. La seule exception étant la capitale de Tokugawa Ieyasu, Edo, qui fut construite à partir de rien sur des marais et épousa un plan d’ensemble qui répondait à des besoins pratiques mais aussi idéologiques. Edo n’a pas été construite sur les principes traditionnels des ères passées mais il s’agissait néanmoins d’une véritable capitale qui devint rapidement au XVIIe siècle la ville la plus peuplée du Japon.

Au milieu du XIXe siècle, Edo dépassait le million d’habitants. C’était la ville qui concentrait les richesses, on y trouvaient les principales maisons marchandes mais aussi la plus importante production artisanale. C’est là que vivaient les principaux intellectuels et où ils enseignaient. C’est là que les progrès de l’industrie et de la science occidentale importés depuis peu étaient les plus avancés. C’est là aussi que les délégations des pays étrangers étaient installés, ne reconnaissant que Edo comme capitale de facto du Japon. La ville était simplement trop importante, cosmopolite et riche pour être ignorée alors que Kyôto était une bourgade endormie et éloignée du coeur battant du pays. Il n’est pas étonnant que dès septembre 1868, quelques mois à peine après le début de la restauration, l’empereur annonça qu’Edo serait dès lors connue comme la « capitale de l’Est » (東京, Tôkyô) et s’y rendit dès septembre avant de s’y installer définitivement en mai 1869 avec le conseil de gouvernement (Tôkyô Sentô). Il s’agissait aussi pour l’empereur d’incarner le changement en s’installant physiquement dans le château du shôgun vaincu (Edo-jô, le château d’Edo, devenant Kôkyô, le palais impérial).

Tôkyô devint capitale du Japon, avec le décès de l’empereur Meiji et son enterrement dans le Kantô, la messe était dite. Les cérémonies d’intronisation de l’actuel empereur eurent même lieu à Tôkyô alors qu’elles avaient jusque là toujours pris place à Kyôto. Cette dernière ne s’avoue cependant pas vaincue. Tout bon Kyôtoïte pourra argumenter qu’il n’y eu jamais de loi votée déclarant Tôkyô comme capitale, seulement la décision de l’empereur d’en changer le nom et de s’y installer. Il n’est pas rare de trouver l’expression de Tôkyô Gyôko (visite impériale à Tôkyô) pour désigner l’absence de l’empereur, avec un peu de mauvaise foi. D’autres experts, plus tolérants, préfèrent dire que Tôkyô et Kyôto partagent de fait le titre de capitale, Kyôto disposant encore d’un palais impérial officiellement fonctionnel (même si jamais habité) où est conservé le trône impérial. Il fut un temps question sous l’empereur Meiji de rebaptiser Kyôto sous le nom de Saikyô, le terme a existé temporairement sur certains documents de la fin du XIXe siècle mais ne prit jamais dans la population (on trouve cependant le saikyô miso pour parler du miso de Kyôto).

Le Japon n’en a pas fini avec ses hésitations, le projet de transfert de capitale revient encore régulièrement, comme un serpent de mer politique. Les dernières propositions furent émises en 1979 et la Diète japonaise vota même en 1995 le transfert de la capitale pour s’éloigner d’une mégapole jugée engorgée. La « nouvelle capitale » devant encore être une ville nouvelle construite spécialement et dédiée aux activités gouvernementales. Les propositions ont varié, allant de l’est vers Tochigi et Fukushima à l’Ouest vers Gifu ou même de retour à Nara! On se dispute encore à la Diète pour savoir quelle est la véritable capitale du Japon, s’il faudrait déplacer la Diète ou seulement les ministères (on ne parle jamais de la résidence impériale) et en 2023 l’agence des affaires culturelles japonaises déménagea finalement à Kyôto, comme un début timide de décentralisation des fonctions gouvernementales. A une question au gouvernement sur le sujet de la capitale, l’ancien premier ministre Shinzô Abe avait répondu que Tôkyô était la capitale parce que tout le monde la considérait ainsi, le débat reste ouvert.